lundi 3 mars 2014

Tourisme & activisme au Vietnam



Guilhem, c'est un ami de promo avec qui j'ai toujours aimé travaillé ; et quand on a passé ses études à travailler en groupe, on mesure à quel point c'est rare et appréciable !
Au milieu du stéréotype de l'étudiant d'école de commerce, il se différenciait par sa simplicité, son authenticité et des valeurs déjà bien ancrées pour un "petit jeune", comme disent les "plus vieux". Il avait toujours des tas d'idées et on pouvait vraiment compter sur lui. Je le voyais déjà entrepreneur, sur des projets un peu fous et surtout, qui lui ressemblaient.
Alors quand il m'a parlé de son projet de collectif touristique équitable, je me suis dis qu'il fallait que je vous le présente, que vous connaissiez un peu mieux ce personnage expatrié au Vietnam depuis la fin de nos études... J'espère que comme moi, il vous inspirera !

Salut Guilhem, raconte-nous un peu ton parcours jusqu'à maintenant ?
Après le Bac, je suis entré dans une école de commerce à Bordeaux. Le cursus m’a amené à faire en 2005 un stage au Vietnam, où je me suis installé dès mon diplôme en poche. J’y travaille depuis dans le tourisme. J’ai commencé par le tourisme moto, puis je me suis spécialisé dans le tourisme responsable et de son application globale.

Faire une école de commerce ça t'a apporté quoi ?
En termes de compétences, l’école de commerce m’a apporté de la diversité. On touche à la gestion, au marketing, à la vente, aux langues étrangères et au développement stratégique. Humainement, faire ce cursus m’a apporté aussi beaucoup. Des voyages, des amis, des montages de projets, etc.


Quelle est la genèse de http://travelactivists.com/ ? Avec qui te lances-tu dans cette aventure ?
Travel Activists, ça fait un moment que ça me trottait dans la tête. L’envie de faire et proposer un tourisme qui colle à ma personnalité et ma conception du voyage. L’idée initiale est venue d’un constat : le business du management de destination touristique est aujourd’hui détenu par des grosses boîtes qui travaillent comme des supermarchés. Elles ne parlent que de profitabilité et exploitent les petits entrepreneurs qui créent des services super sympas d’hébergement, de restauration, d’activités. Or ces boîtes qui brassent énormément d'argent n’apportent pas de vraie valeur ajoutée au produit touristique final. L’idée était donc de monter ces petits prestataires de services en un collectif ou un réseau et de travailler de manière plus équitable.
Je me lance la dedans avec un ami français qui bosse au Vietnam depuis une bonne douzaine d’années, dans le tourisme aussi.

As-tu toujours eu cette envie d'entreprendre ? 
J’aime entreprendre. J’ai toujours eu des idées, pleins d’idées. Mais il faut que les conditions soient réunies pour se lancer dans une entreprise. Avoir un back-up en quelque sorte. Au Vietnam, pas d’indemnités chômage, pas d’aide à la création d’entreprise, pas de subventions, etc. Si tu te plantes, financièrement tu peux vite être dans la merde.
Après d’où vient l’envie d’entreprendre, je ne sais pas. Peut-être du besoin d’exprimer sa vision des choses. L’entreprise est un super moyen d’expression.

Si tu n'avais pas eu cette idée, que ferais-tu aujourd'hui ?
Je serais toujours en train de bosser pour un patron. Ou peut-être que j’aurais monté une sandwicherie (un délire que je réaliserai un jour, c’est sûr).

Te projettes-tu dans l'avenir ? 
Dur à dire. Le Vietnam est un pays qui évolue et change vite. J’aimerais bien que Travel Activists fasse son chemin, et pourquoi pas un jour exporter le concept sur d’autres pays.

Etre heureux au travail, c'est quoi selon toi ?
Aimer ce qu’on fait, évidemment. Et puis aimer les gens avec qui on travaille. Avoir le sentiment de faire les choses bien.

Quelle part d'importance donnes-tu au travail ?
Pour moi c’est la famille et les potes d’abord et ça le sera toujours. Je ne conçois pas les journées de travail de 12h. Je ne comprends pas les gens qui placent leur performance pro tout en haut de leur pyramide. Même s’ils ont certainement leurs raisons. Le boulot sert le reste. Je veux être heureux au travail et réussir ce que j’entreprends, mais je sais ce que je suis prêt à engager et les sacrifices que je ne ferai jamais.

Qu'est-ce qui te stimule au quotidien ?
Le thé vert. J’en bois pas loin de deux litres par jour ! 
Sinon ce sont mes idées, mes projets ; les discussions avec les amis, les voyageurs ; et puis mes deux petites filles qui me rappellent en permanence que ce que je fais, je ne le fais pas uniquement pour moi.

Qu'est-ce qu'un bon leader selon toi ?
Pour moi un bon leader c’est quelqu’un qui est d’abord écouté et respecté pour sa compétence. Après le cliché du meneur d’hommes braillard et autoritaire, ça ne m’intéresse pas. L’important c’est le résultat, chacun a sa manière de faire et devra savoir l’adapter à son audience. On le voit beaucoup chez les guides. Ils ont leur manière à eux de gérer un groupe. Les meilleurs sont ceux qui adaptent leur discours et leur ton selon la personnalité des voyageurs qu’ils accompagnent.

Que penses-tu de notre génération et de l'époque dans laquelle elle doit s'insérer dans le monde du travail ?
J’ai l’impression qu’on est une génération qui a des idées et qui surtout dispose de moyens nouveaux pour les faire vivre et les propager. On a une ouverture sur le monde exceptionnelle. On voyage mais on découvre aussi différentes cultures facilement en restant assis devant un écran. L’époque selon moi est à la mobilité. Il est devenu tellement facile de s’expatrier, du coup les opportunités de travail sont décuplées. Dans tous les domaines et pour toutes les compétences, si la demande n’existe pas à côté de chez vous, il y a de fortes chances pour qu’elle existe ailleurs.

Que penses-tu du regard que les autres générations, le gouvernement et les médias portent sur les jeunes aujourd'hui ?
Difficile à dire depuis le Vietnam. Je ne me rends plus trop compte de la situation en France et surtout ne la vis pas au quotidien. J’imagine qu’on compte sur les jeunes (y a des retraites à payer). Après la tradition veut que les plus anciens portent un regard très critique sur les plus jeunes. Ça a toujours été comme ça je crois et ça le sera encore. Le fameux « de mon temps » n’est pas prêt de disparaître.

Quels sont, selon toi, les principaux avantages à être un jeune aujourd'hui ?
Cette ouverture sur le monde est un avantage. Le confort de vie aussi. Après la réussite sociale et professionnelle me paraît plus compliquée qu’avant. Paradoxalement il y a des opportunités plus nombreuses, mais le chemin qu’elles proposent semble plus tortueux et la chance d’arriver au bout plus faible.

Plus globalement, quels sont les principaux enjeux de notre époque selon toi ? Par quoi te sens-tu le plus concerné ? Et quel rôle avons-nous à /pouvons-nous jouer ?
Il y a deux choses aujourd’hui qui me font flipper. La situation environnementale dans laquelle on est en train de se mettre. Et « l’abrutisation » des peuples par les médias et les classes dirigeantes. Que faire… ? De l’activisme, dans tous les domaines. Nous on s’occupe du tourisme.

As-tu déjà travaillé en France ? Quelles sont les grandes différences entre la France et le Vietnam selon toi ? D'abord en tant que salarié, puis en tant qu'entrepreneur ?
J’ai très peu travaillé en France. En tant que salarié, la grosse différence se situe au niveau des garanties sociales. Les avantages sociaux perçus en France sont juste énormes. Ça fait marrer pas mal de monde par ici quand on explique que les salariés français font grève pour telle ou telle raison. En tant qu’entrepreneur, la vie est beaucoup plus facile au Vietnam. Moins de réglementations, moins de taxes, moins de surveillance. On est très libre. Tout ça est finalement assez paradoxal dans une république socialiste.

Quelle image as-tu de la situation des jeunes en France ? 
Pour être franc, ma vision des jeunes en France se limite à celle de mes potes et de ma famille. Ça va plutôt bien, tout le monde s’en sort, c’est parfois dur mais encore une fois il y a un vrai confort de vie.
Au Vietnam, la jeunesse est à multi-vitesses avec des écarts énormes. Le premier fossé se situe entre la ville et la campagne. Après en ville on va du gosse de riche qui roule en Porsche au cireur de chaussures. La galère n’est pas la même pour tous.

Projettes-tu de revenir en France ? Et pour y faire quoi ?
Peut-être, on ne ferme pas la porte. Si on rentre avec ma femme, on se lancerait certainement dans la création d’un resto Viet. Mais quelque chose d’authentique et original. Un lieu de dépaysement. Pas un truc kitchos avec des samoussas et du riz cantonnais.

A la manière de Proust, quelques questions sur ton rapport au travail :
Ta vertu préférée : l’intégrité
La qualité que tu préfères chez un(e) collaborateur(rice) : la conscience professionnelle
Ce que tu apprécies le plus chez les gens avec qui tu travailles : leur amour du truc
Ton principal défaut : je me lasse vite
Le don que tu aurais aimé avoir : celui de parler toutes les langues
Le rêve que tu aimerais réaliser : ne plus avoir besoin de travailler et pouvoir profiter de la vie le plus tôt possible
Ton modèle : personne en particulier
L'entreprise que tu aurais aimé avoir créée : la toute première entreprise de tourisme au Vietnam, les pionniers quoi.
Ce qui t'inspire : mes potes et internet
Une devise : l’union fait la force



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